Infos
Date :
22 et 23 novembre 2021
Titre :
Années 20/20
Cinedoc / INHA / Paris 8
Colloque International

Claudine Eizykman, « l’Avant-garde cinématographique comme expérience originaire », Le Film-après-coup, PUV, 2019.
Les « Années 20 », décennie prodigieuse des « expériences originaires » qui voit en Europe l’apparition d’un cinéma alors qualifié de pur, absolu, poétique, abstrait, intégral, Dada, surréaliste, ou encore l’attrait de ces avant-gardes pour certains films scientifiques et du cinéma d’avant la Première guerre Mondiale, seront à l’honneur et revissées à l’occasion de leur centenaire. Une rétrospective exceptionnelle d’une soixantaine de films emblématiques ou plus rares donnera la mesure de la naissance tumultueuse de formes cinématographiques à rebrousse-poil de l’uniformisation narrative et industrielle de l’époque. Télescopant science, arts, documentaire, attractions et provocations diverses, de l’absolument pur à l’absolument impur, ces films ont définitivement ouvert l’espace du jeu et de l’expérimentation au cinéma.
En complément de la rétrospective, un colloque international réunissant historiens et chercheurs spécialistes des avant-gardes cinématographiques des Années Vingt se tiendra les lundi 22 et mardi 23 novembre 2021 à l’auditorium de l’institut National d’Histoire de l’Art.
Cinédoc Paris Films Coop • Université Paris 8 Vincennes Saint-Dennis • ESTCA • Institut National d’Histoire de l’Art (INHA) • CNC • La Cinémathèque Française • Le Grand Action • Collectif Jeune Cinéma • Narodni filmovy archiv • Fondation Jérôme Seydoux Pathé
Détail du programme
22 et 23 novembre 2021
Auditorium de l’INHA
9h45 : Accueil des participant.e.s
10h00 : Introduction par Guy Fihman
Graphes, documentaires, libellules et liserons
Modération : Cécile Sorin, Université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis
10h15 : Projection Filmstudie, Hans Richter, 1926, 4′
10h20 : L’impulsion graphique, par Dominique Willoughby, Université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis
Si Cohl a devancé l’appel à sa façon, la première salve des films absolus est graphique et / ou vient de peintres : Ruttmann, Richter, Eggeling, Man Ray, Duchamp, Léger, et se poursuit avec Fishinger et Len Lye et quelques autres, jusqu’à aujourd’hui. Se projetant dans le futur tout en renouant avec les origines graphiques du principe cinématographique, ces films contribuent aux nouveaux modèles de construction de la perception par le film, en ouvrant un nouveau champ des formes cinématographiques. Leur mise en œuvre a suscité des mutations techniques et perceptives conséquentes du dispositif cinématographique, bien au-delà d’une simple poursuite des problématiques picturales par le cinéma. Ce qui nous amènera à interroger la notion floue de film dit « abstrait », et à déplier plus avant de quoi elle a pu être le nom.
10h50 : L’expérimentation documentaire des années 1920, par Federico Rossin, programmateur indépendant
Dans les années 20, théoriciens et cinéastes considéraient le cinéma comme un médium incomparable pour révéler le réel. Moholy-Nagy, Vertov, Epstein, Dulac ne se contentaient pas de la reproduction de la réalité par la caméra : ils théorisaient la production d’une nouvelle réalité et la recherche de son essence par la médiation artistique et une nouvelle vision. Le réel capté par la caméra était considéré comme une mosaïque à construire et l’art comme un procédé de démontage du visible, de déchiffrage du monde. En se méfiant de l’œil humain, et en fétichisant la technique, le simple enregistrement de la réalité ne leur suffisait pas, et pourtant ils pensaient tou(te)s très clairement réaliser des œuvres en lien fort avec le « cinéma documentaire ». À cette époque, si on lit les revues et les manifestes, une distinction tranchée entre « documentaire » et « expérimental » n’existait pas encore.
11h20 : Projection Uit het rijk der kristallen, J. C. Mol, 1927, 7′
11h30 : Cinéma de l’invisible, animaux photogéniques et vie sentimentale des végétaux : cinéma scientifique et avant-garde à Paris, par Maria Ida Bernabei, Università degli Studi di Udine
Cinéma de l’invisible, animaux photogéniques et vie sentimentale des végétaux : cinéma scientifique et avant- garde à Paris. Par son inclusion systématique au sein de la programmation des nombreuses salles spécialisées et ciné -clubs qui se créent au cours de la deuxième moitié des années vingt dans les principales villes d’Europe, le film scientifique joue un rôle déterminant dans la construction de l’avant-garde cinématographique. Notamment en raison des techniques spécifiques qu’il développe – ralenti, accéléré, microcinématographie et prises de vues sous-marines – il peut revendiquer sa propre place dans la réflexion sur la spécificité du médium, tout en catalysant la définition de quelques concepts fondamentaux des théories esthétiques de l’époque. Pourquoi l’avant-garde est-elle si magnétiquement attirée par le film scientifique ? L’enquête sur la scène parisienne essayera de nous fournir quelques réponses.
12h : Discussion
12h45 : Pause
Pur/Impur
Modération : Eugénie Zvonkine, Université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis
14h20 : Projection Jeux des reflets et de la vitesse, Henri Chomette, 1923 – 25, 7′
14h30 : Du pur Chomette, par Prosper Hillairet, Université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis
Il y a eu des pages et des pages sur la question « Qu’est-ce que le cinéma ? ». Il aura fallu à Henri Chomette deux films courts et quelques lignes écrites pour amorcer la question du « cinéma pur ». La brièveté des films et textes est-elle dans la réponse ? Parcourons les deux films Jeux des reflets et de la vitesse et le programmatique Cinq minutes de cinéma pur, pour découvrir, par-delà le « pur », un rapport au monde instauré par le cinéma, une traversée des états de la matière. Et la Pierre liquide.
15h : Projection Cinq minutes de cinéma pur, Henri Chomette, 1925, 5′
15h05 : Voici venu L’Âge d’Or, par Gabriela Trujillo, Directrice de la Cinémathèque de Grenoble
C’est un cri d’amour et de révolte, le film emblématique d’une génération d’artistes et poètes proches du surréalisme. C’est l’aboutissement d’une décennie d’expérimentation, utilisant des techniques de son pionnières, créant des ellipses inédites et des effets de montage comme jamais le cinéma n’avait osé jusque-là. C’est aussi le nom même du scandale : après cinquante ans de censure et une restauration, voici enfin L’Âge d’or de Luis Buñuel.
15h35 : Fondements idéologiques de la pensée et de la production de Man Ray, par Ana Puyol Loscertales, Universidad de Zaragoza
La construction idéologique de Man Ray commence dans son contexte familial : émigrés Russes dont le père a travaillé dans les terribles usines du florissant secteur textile américain. L’artiste a réaffirmé ses affinités avec une pensée sociopolitique en rapport avec l’anarchisme et les tendances individualistes des philosophes américains à travers son immersion dans le Ferrer Center new-yorkais – créé à la mémoire du fondateur de l’École Moderne – et son intégration ultérieure dans la colonie de Ridgefield, plutôt anarchiste. Le cadre éducatif et la formation intellectuelle – lectures, publications, système d’enseignement, professeurs et collègues – qui ont caractérisé les trois décennies de sa vie aux Etats-Unis ont été fortement marqués par les repères de la pensée libertaire et, évidemment, cette influence a laissé une trace essentielle sur son œuvre qui enrichit sa lecture et précise sa position au sein des avant-gardes.
16h05 : Discussion
Auditorium de l’INHA
9h45 : Accueil des participant.e.s
Impressionnisme, danse, musicalité
MODÉRATION : Jennifer Verraes, UNIVERSITÉ PARIS 8 VINCENNES – SAINT-DENIS
10h15 : Impressions des Années 20, par Mélanie Forret, Université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis
Les années 20 ont vu naître, sous la plume et la caméra d’une poignée de cinéastes-théoriciens, une nouvelle façon d’envisager le cinéma et de le pratiquer, avec l’idée commune d’une « pensée visuelle ». Une approche du cinéma privilégiant toute forme de rythmes, de mouvements (intérieurs / extérieurs), de « sensations » (Dulac), de « photogénie » (Delluc, Epstein), qu’il a été convenu de nommer « école impressionniste ». Nous proposons ici un retour sur cette pensée, contextualisant et définissant le terme « impressionniste » au cinéma, et montrant ses liens avec l’avant-garde formelle.
10h45 : Projection Disque 957, Germaine Dulac, 1929, 6′
11h : Ballets mécaniques, danses cinégraphiques, par Bárbara Janicas – Université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis
Malgré la prédominance du modèle musicaliste au sein des débats sur le cinéma dans les années 1920, de nombreuses évocations de la danse ponctuent les œuvres et les discours des cinéastes d’avant-garde, de Dulac à Léger, en passant par Man Ray. Des fragments de corps dansants y sont amenés à dialoguer avec des objets du quotidien, des engrenages de machines ou encore des phénomènes naturels et lumineux. Plus qu’une référence à des manifestations chorégraphiques modernes (danses serpentines, créations des Ballets Suédois, danses burlesques des années folles), les figures dansées convoquées das les films d’avant-garde véhiculent de nouvelles visions de la danse élargie à l’universelle mobilité du monde et méritent d’être envisagées en tant que signe d’une « pulsion dansante » qui inspire en creux les expérimentations filmiques de ces cinéastes.
11h30 : Musique modèle, musique visuelle, par Arthur Côme, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Pendant les années 1920, la musicalité des images a structuré et clivé le cinéma, mais elle a aussi participé à son autonomisation artistique. Partir de la musique, la traduire en images, l’orchestrer visuellement, tels sont les procédés qui ont présidé à la naissance des trois films de musique visuelle de Germaine Dulac : Disque 957, Étude cinégraphique sur une arabesque et Thèmes et Variations, premiers arrangements pour écran.
12h : Discussion
12h45 : Déjeuner
Politiques du cinéma
MODÉRATION : Damien Marguet, UNIVERSITÉ PARIS 8 VINCENNES – SAINT-DENIS
14h20 : Czech Avant-garde With/Out Film, par Národní filmový archiv (NFA) / Archives nationales du film – Prague (Communication en anglais non traduite)
Le cinéma est un rêve de la génération de l’avant-garde depuis 1920, mais il n’est devenu une réalité qu’à la fin de la décennie. Au lieu de films, les membres de cette génération ont créé – ou plutôt produit – des objets littéraires et visuels exprimant l’idée de la société moderne. Les idées radicales de libération et de modernisation de la société ont contribué à formuler les tâches futures de ce média et ses fonctions – esthétique, sociale et politique.
14h50 : Politique de l’expérimentation, par Patrick de Haas, Paris 1 Panthéon-Sorbonne
On essaiera de voir en quoi, dans les années 1920, les expérimentations « formelles » peuvent relever d’une analyse politique. On rappellera par ailleurs l’engagement de nombreux artistes-cinéastes dans le bain de l’Histoire. L’opposition souvent affirmée entre d’un côté la revendication « moderniste » d’autonomie et de l’autre la dissolution de l’art dans la vie par une certaine « avant-garde », s’en trouve-t-elle fragilisée ? Le désastre en cours (années 2020) de l’état du monde conduit-il à modifier l’approche des rapports entre expérimentation et « engagement » ?
15h20 : Les deux défis de Fernand Léger, par François Albera, UNIL – Université de Lausanne
De Ballet mécanique (1924) à son sketch de Dreams that Money Can Buy (1947) Fernand Léger développe une poïétique du cinéma constructive fondée sur l’animation d’objets inanimés, la décomposition-recomposition des mouvements d’êtres ou d’objets animés, selon un paradigme mécanique-discontinu qui prend à rebrousse-poil l’idée commune de « captation » ou de restitution du mouvement par le film. Le « passage » au cinéma de Léger revêt une signification polémique particulière dans les deux champs des arts plastiques et du cinéma. En effet si cette poïétique s’inscrit dans les courants artistiques et poétiques auxquels il participe (futurisme, cubisme, orphisme, simultanéisme), c’est que ceux-ci ont été profondément bouleversés par le cinéma. Et qu’à l’inverse ce dernier s’est massivement situé en deçà de cet ébranlement en s’efforçant de se conformer aux arts institués. Ce sont ces deux défis que relève Fernand Léger jusque dans leurs conséquences politiques.
15h50 : Discussion finale et clôture du colloque
Entrée libre dans la limite des places disponibles.
Institut national d’histoire de l’art
2 rue Vivienne, 75002 Paris
Métro ligne 3, station Bourse
Métro ligne 1, station Palais Royal
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