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ValĂ©rie Jottreau, doctorante de l’ESTCA, est dĂ©cĂ©dĂ©e le 30 aoĂ»t 2024.

ValĂ©rie Jottreau, doctorante de l’ESTCA, est dĂ©cĂ©dĂ©e le 30 aoĂ»t 2024. Ces trois textes, rĂ©digĂ©s par les collĂšgues du laboratoire et les co-fondatrices de la revue Images secondes lui rendent hommage. Tous les membres du laboratoire partagent la douleur de sa famille et de ses proches.


ValĂ©rie Jottreau avait une relation Ă  la fois passionnĂ©e et rigoureuse avec le cinĂ©ma. Elle Ă©tait toujours soucieuse des façons dont il pouvait ĂȘtre enseignĂ©, discutĂ©, mais aussi partagĂ© Ă  travers les nouvelles technologies de l’image dont elle connaissait par ailleurs trĂšs bien les infrastructures matĂ©rielles. Nous nous en Ă©tions rendu compte en travaillant avec ValĂ©rie Ă  l’élaboration du site de l’ESTCA, qu’elle a entiĂšrement imaginĂ© et mis concrĂštement en Ɠuvre. La rencontre entre les images et les mots Ă©tait l’une de ses passions secrĂštes, et celle-ci pouvait s’incarner dans la fabrication d’un site dĂ©diĂ© Ă  la recherche sur le 7e art et sur d’autres images, fixes ou en mouvement, qui gravitent autour de lui. Ce site internet porte la marque du regard-artiste de ValĂ©rie, qui aimait vagabonder, outre le cinĂ©ma, du cĂŽtĂ© de la photographie, de la littĂ©rature ou encore du dessin. Elle fut aussi l’une des forces motrices de la crĂ©ation, en 2018, avec d’autres doctorant.e.s de l’ESTCA, de la revue en ligne Images Secondes, dĂ©diĂ©e Ă  l’exploration et Ă  l’analyse de l’histoire et des mutations du cinĂ©ma. ValĂ©rie Ă©tait une chercheuse perfectionniste et gĂ©nĂ©reuse, comme en avait tĂ©moignĂ© le colloque sur Philippe Garrel qu’elle avait co-organisĂ© avec Fabien Boully en novembre 2018. IntitulĂ© « Philippe Garrel, le temps incorporé », elle avait questionnĂ© sans complaisance le rĂ©alisateur des Amants rĂ©guliers, sans crainte d’arpenter avec lui les chemins de traverse, parfois les impasses, d’un cinĂ©ma tourmentĂ©. Qu’elle n’ait pu achever sa thĂšse sur Garrel suscite un profond regret, mĂȘme si demeure en nous le souvenir d’échanges exemplaires oĂč s’est rĂ©vĂ©lĂ©e l’éthique profonde de la chercheuse. C’est aussi l’hĂ©ritage cinĂ©phile qu’elle nous laisse, et que toute l’équipe de l’ESTCA continuera d’explorer avec elle.

 


Lorsqu’un projet de revue universitaire coordonnĂ©e par des doctorant·es de l’ESTCA a Ă©tĂ© envisagĂ©, ValĂ©rie s’est immĂ©diatement portĂ©e volontaire pour y participer. Elle s’est montrĂ©e prĂ©sente et diplomate, jusqu’à fonder Images secondes avec quatre d’entre nous, Marion, Florence, Lydie et CĂ©line. Les discussions ont toujours Ă©tĂ© vives, riches et respectueuses, pour dĂ©cider ensemble de la direction que nous souhaitions donner Ă  notre publication.
ValĂ©rie a mis ses compĂ©tences informatiques au service du projet en crĂ©ant un site capable d’hĂ©berger notre jeune revue. Jusqu’à son dĂ©part Ă  Perpignan, elle est restĂ©e engagĂ©e dans le comitĂ© de rĂ©daction d’Images secondes et, mĂȘme aprĂšs ĂȘtre partie vers d’autres horizons gĂ©ographiques et professionnels, elle est restĂ©e prĂ©sente pour nous conseiller.
Nous garderons d’elle le souvenir d’une personne d’une grande intelligence et d’une incroyable culture, investie dans l’universitĂ© et fermement dĂ©cidĂ©e Ă  y construire du commun ; son dĂ©cĂšs nous prive d’une camarade de grande qualitĂ©, et nous fait beaucoup de peine. Nous envoyons nos pensĂ©es les plus douces Ă  ses proches et Ă  tous·tes celles et ceux touché·es par sa disparition.

 


En 2019, ValĂ©rie Jottreau a pu concrĂ©tiser ce qui fut sans doute le grand projet de sa vie, auquel elle s’est consacrĂ©e avec passion : la crĂ©ation d’un lieu d’accueil pour les artistes, la Galerie Lligat situĂ©e dans le centre historique de Perpignan, au sein d’une belle demeure du XVIIIe siĂšcle au dĂ©labrement soignĂ© avec cour intĂ©rieure, compagnon et chat sautillant. Lligat veut dire « lié » en catalan et renvoie aussi au havre du mĂȘme nom, Portlligat situĂ© Ă  CadaquĂšs sur la cĂŽte Nord-Est de l’Espagne oĂč Dali s’installa avec Gala dans une bicoque de pĂȘcheur.
Ce lieu a Ă©tĂ© conçu comme espace de pensĂ©e, de transmission, de promotion et de rĂ©sistance de l’art contemporain, mĂȘlant artistes installĂ©s ou originaires de la rĂ©gion Ă  d’autres venus d’ailleurs (avec un axe franco-germanique affirmĂ©) : on peut citer Naym Ben Amara, Didier BĂ©quillard, Enna Chaton, Marielle Degioanni, ValĂ©rie Du ChĂ©nĂ©, Jihane Khelif, Brigitte KĂŒhlewind Brennenstuhl, JĂ©rĂ©my Louvencourt, Muriel Persil, Patricia Stheeman, Edouard TrĂ©meau, Muriel Valat-B (voir le site : https://galerielligat.com). L’approche choisie par la galerie s’est affirmĂ©e comme multidisciplinaire, de la cĂ©ramique Ă  la photo et au dessin auquel ValĂ©rie accordait une place importante. Les thĂšmes de prĂ©dilection des Ɠuvres choisies questionnent l’anthropologie, l’histoire, la mĂ©moire, la dĂ©mocratie, la nature et le monde vivant. La Galerie Lligat est Ă©galement devenue un lieu de publication et a entrepris l’organisation d’expositions hors les murs (en collaboration avec le MusĂ©e d’Art Moderne de Collioure). C’est un lieu accueillant, une petite bulle d’invention, de chaleur humaine et de libertĂ© dans une ville par ailleurs assez rude.

ESTCA